SICHTWEISENSCHWEIZ.CH pose toujours les trois mêmes questions sur les facteurs de réussite de la Suisse à différentes personnes.
Quel regard Sheldon Masseraz, coprésident des Jeunes Vert·e·x·s Suisse, porte-t-il sur la Suisse ?
Question 1 : Quelles sont les raisons qui ont conduit au succès de la Suisse dans le passé ?
En 1291, le pacte fondateur de la Suisse a été scellé avec comme objectif principal de se soutenir mutuellement face à tout menace qui pourrait survenir. Le dicton «l’union fait la force» a ainsi pris vie cette année-là et a perduré jusqu’à aujourd’hui. Dans le préambule de notre constitution, il est écrit «la force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres». C’est cela qui a guidé le peuple suisse durant ces siècles derniers, et qui a rendu la Suisse d’aujourd’hui possible.
Cependant, la Suisse s’est aussi considérablement enrichie au travers de moyens profondément immoraux. La Suisse a un passé clairement colonial et a participé activement au commerce des esclaves et aux plantations sous la protection de puissances coloniales. Même si elle n’a jamais possédé de colonies, il s’agit clairement de colonialisme qui a permis d’accumuler d’énorme richesses en Suisse et de faire croître le pays, notamment en finançant des infrastructures d’intérêt public.
L’exemple le plus connu est celui de David de Pury, qui a fondé plusieurs sociétés actives dans le négoce de diamants et de bois exotiques du Brésil, deux domaines économiques intrinsèquement liés au commerce triangulaire et à la traite d’esclaves. Un autre exemple est celui du négoce d’or avec l’Allemagne nazie. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Suisse a constitué la principale plaque tournante pour l’or en provenance des territoires dominés par le IIIe Reich. Une part importante de cet or négocié a été volé aux personnes juives persécutées. D’ailleurs, les biens de haute valeur comme les œuvres d’art ont été négociés en Suisses ou acheté par des entreprises et riches familles suisse. Ce passé sombre ne doit pas être oublié. Il doit même être adressé, afin mieux connaître notre passé, faire évoluer les attitudes et restituer, si possible les bien et richesses acquises.
Question 2 : Pourquoi la Suisse connaît-elle aujourd’hui le succès ?
Ce qui, selon moi, a contribué à la création d’une Suisse solidaire est l’influence des mouvement sociaux et du bloc socialiste dans le monde politique suisse au 20ème siècle. À l’heure où les Vert e s n’existaient pas encore, les revendications pour de meilleures conditions de travail et la mise en place d’un État social fort sont nées des luttes sociales et de la pression du peuple pour des conditions de vie dignes. Grace à ces luttes, nous avons un service public fort et travaillons aujourd’hui 42 heures par semaine contre 60 auparavant (et c’est encore trop, la réduction du temps de travail doit se poursuivre pour des raisons sociales et écologiques, mais c’est un autre débat).
Ces dernières années, la gauche a permis des avancées significatives en matière de protection sociale, de droit du travail et de sécurité sociale tout comme elle a permis de nette amélioration dans la protection de l’environnement. La Suisse est pleine de succès, car elle s’est construite autour d’un État social fort, d’un service public universel et de qualité, ainsi que de mécanismes de solidarité envers les personnes précaires.
Question 3 : Que faut-il pour que la Suisse continue à connaître le succès à l’avenir? Qu’est-ce qui vous rend confiant à cet égard ?
Cette fameuse «suisse solidaire» est aujourd’hui clairement menacée par les partis de droite. Autrefois un grand parti profondément «radical» et capable de trouver des compromis de qualité avec la gauche, le PLR mène aujourd’hui aveuglément une politique économique néolibérale destructrice et compte pour cela sur le soutient de l’UDC, parti pourtant raciste, xénophobe, homophobe, anti-féministe, anti-pauvre et anti-écologiste. Ces deux partis, très souvent soutenus par le Centre, ne prennent aucune décision pour renforcer les fondements qui ont permis à la Suisse d’être pleine de succès. Au contraire, les décisions prises actuellement vont de plus en plus à l’encontre des vrais besoins du peuple.
Pour que la Suisse puisse se développer en un État profondément juste et solidaire, qui défend des valeurs écologistes, antiracistes, libertaires, pacifistes et démocratiques, un rééquilibrage des forces politiques au niveau fédéral est plus que jamais nécessaire. Les enjeux liés à la crise climatique et sociale sont si grands qu’une réponse forte et ambitieuse est nécessaire pour faire de la Suisse un pays exemplaire. Le succès futur de la Suisse dépend donc clairement d’un virage à gauche aux prochaines élections fédérales.
Ainsi, il sera possible de respecter pleinement le préambule de notre chère Constitution, porteuse pour moi de ce qui rend la Suisse belle et pleine de succès. Car dans ce préambule, il est aussi écrit que la Confédération s’évertue à «renforcer la liberté, la démocratie, l’indépendance et la paix dans un esprit de solidarité et d’ouverture au monde» pour que toutes les personnes qui vivent en Suisse puissent «vivre ensemble leurs diversités dans le respect de l’autre et l’équité», tout en restant «conscients des acquis communs et de leur devoir d’assumer leurs responsabilités envers les générations futures».
Ces idéaux sont pour moi porteurs d’espoir, car ils sont le fondement même de notre beau pays. Ainsi, je reste confiant qu’il y aura, tôt ou tard, un virage politique positif pour faire de la Suisse un pays encore plus juste et solidaire qu’il ne l’est aujourd’hui.
SICHTWEISENSCHWEIZ.CH remercie Sheldon Masseraz pour cette interview.
Sur SICHTWEISENSCHWEIZ.CH, vous trouverez d’autres interviews avec les présidents et présidentes des sections jeunesse des partis politiques suisses.
Bref portrait de Sheldon Masseraz

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